Plus de deux ans après le début de la guerre entre l’Ukraine et la Russie, le conflit oriental semble s’exporter au Mali. C’est ce que révèle de manière plus formelle le théâtre d’opération déroulé à Tinzaouaten, une localité au nord du Mali, proche de la frontière avec l’Algérie.
Les hostilités qui ont opposé les forces armées maliennes (FAMA) et leurs alliés russes aux rebelles séparatistes ont vu une victoire éclatante des contingents du CSP-DPA, l’Alliance des groupes armés séparatistes à dominante touareg.
« Nos forces ont définitivement anéanti ces colonnes de l’ennemi. Un important matériel roulant et armements ont été saisis ou endommagés. Les rares survivants des rangs Famas et de la milice (russe) Wagner ont été faits prisonniers », précise un communiqué signé du CSP-DPA.
Contexte et forces en présence
Ravivée en 2012, la guerre du Mali, anciens conflits ethno-nationalistes (entre les factions touaregs revendiquant l’autorité d’un État distinct de l’Etat central), a été favorisée un an plus tôt par la guerre civile libyenne qui a emporté Mouammar Kadhafi.
En effet, profitant du pillage des arsenaux militaires libyens, des groupes salafistes djihadistes et indépendantistes pro-Azawad ont lancé une insurrection sur Bamako avec en ligne de mire la vision sécessionniste, celle de créer l’Etat de l’Azawad.
Parmi elles, les touaregs du Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA, indépendantiste), Ansar Dine (salafiste), Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI, djihadistes) ou encore le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO).
Depuis 12 ans, la situation a évolué, malgré une certaine cristallisation des ambitions des différentes parties. L’Etat malien dirigé par la junte militaire d’Assimi Goïta, a noué des partenariats avec la Russie de Vladimir Poutine, qui opère par son agence paramilitaire Africa Corps (ex-Wagner).
L’alliance des groupes armés séparatistes à dominante touareg (CSP-DPA), est quant à elle soutenue par les les services secrets militaires ukrainiens, qui ont par ailleurs confirmé que leurs renseignements étaient impliqués dans l’attaque de Tinzaouatine.
La Position Africaine
Dans un contexte où les alliances se font et défont, l’Afrique compte avec ses institutions un nombre considérable de tentatives de résolution de la crise malienne.
Au titre des plus importants et des plus récents, d’abord, l’accord de Ouagadougou signé le 18 juin 2013 entre l’Etat malien et les groupes armés rebelles du MNLA et alliés; ensuite, l’accord d’Alger, signé le 15 mai et 20 juin 2015 à Bamako après des négociations menées à Alger entre la République du Mali et la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA).
Depuis, les pays africains, notamment ceux de la CEDEAO, sont restés dans le statu quo d’observateurs face à cette crise. Cette inertie communautaire a été accentuée par les sanctions imposées au Mali par la CEDEAO qui exige un retour à l’ordre constitutionnel et une reprise en main du pouvoir par les civils.
Si le Niger et le Burkina-Faso, tous dirigés par des pouvoirs militaires ont montré leur solidarité à faire front commun face à tous les mouvements insurrectionnels du Sahel, l’Algérie est restée quant à elle dans une position ambiguë face au brouhaha géopolitique. Ce mutisme algérien s’explique notamment par la rupture de la relation de confiance entre l’Algérie et le Mali.
En rappel, le gouvernement malien accusait l’Algérie d’ingérence dans les affaires intérieures du Mali et de soutenir les mouvements terroristes et séparatistes au Sahel. Cette annonce avait précipité le retrait du Mali des accords d’Alger.
Notons que le Mali partage avec l’Algérie plus de mille kilomètres (1239 km) de frontières. Une stabilité au Mali, passerait forcément par une entente avec le pays des fennecs.
Michel Glory SAM TAKPAH
Journaliste Togolais