En Afrique, la problématique de l’accès de la jeune fille ou de la femme au numérique occupe une place névralgique au cœur du processus de développement de nos Etats. Pour garantir une éducation inclusive de cette couche laisser pour compte, des projets, programmes et campagnes ont été initié par des organisations internationales telles que Unicef et Plan International pour lutter contre les inégalités des rapports de pouvoir et des privilèges entre des personnes de sexe différent, afin de libérer tous les peuples des normes nuisibles et destructrices.
Parler de l’inclusion numérique, c’est faire allusion au processus d’ouverture sur le monde des réalisations issues du domaine du digital.
« Les normes sociales font référence aux rôles, les atteintes des droits, les stéréotypes et les attitudes, les coutumes et les pratiques nuisibles, y compris la violence sexuelle. De ce fait, le rôle des normes de genre a toujours été de maintenir la femme dans une situation d’éternelle assistée et de vulnérabilité intellectuelle. Partant de ce constat, les normes influencent négativement l’accès de la jeune fille ou de la femme aux nouveaux moyens de communication, d’échange et de gain d’argent », a expliqué Rahile MIJIYAWA, juriste et activiste féministe.
Longtemps mises à l’écart du processus de digitalisation du continent à cause des normes sociales et culturelles, les femmes sont victimes des normes sociales. Se définissant comme l’ensemble des règles, des lois et des pratiques informelles instaurées dans une communauté et dont tout le monde est appelé à respecter, les normes sociales constituent une épée de Damoclès qui plane sur la tête de la jeune fille et entrave son épanouissement et son accès au numérique.
En Afrique, les hommes sont ceux qui ont le monopole de la chose numérique. Par ailleurs, l’utilisation du téléphone ou de l’internet implique en premier lieu la question de l’alphabétisation. Moins instruit et moins éduquées, elles sont obligées de se soumettre à l’homme. Toujours dans l’ombre de ce dernier, elle est obligée de se conformer à certaines exigences. Avec un taux de 57% seulement, c’est l’Afrique subsaharienne qui accuse le plus faible niveau au monde d’alphabétisation chez les femmes.
Pour Floriane Klinklin ACOUETEY, Experte Genre au Ministère des Armées au Togo : « Le problème d’alphabétisation est lié au fait que dans plusieurs sociétés africaines, les gens ont tendance à croire qu’une femme à l’école n’aboutira à rien. Fondée sur les conséquences directes des normes sociales, elles sont excluent dans le processus de l’inclusion numérique par le simple fait d’être femme ».
Par ailleurs, la question du pouvoir économique empêche la jeune fille ou la femme de se familiariser avec le digital. Souvent reléguées au second plan, moins riches que les hommes, les femmes n’ont pas souvent les moyens pour s’offrir certains appareils.
Laissées dans le second rôle, il existe une norme culturelle en Afrique qui affirme que « la place de la femme est à cuisine ». De ce fait, toujours dans les travaux domestiques, elle est vite dépassée par l’avancement du numérique et aura moins de temps devant son ordinateur ou son téléphone par exemple. La réalité, elle retrouve ailleurs. Les citadines sont des privilégiées.
Les enjeux liés à la présence en ligne de la jeune fille
En ligne, la jeune fille ou la femme n’est pas souvent en sécurité. Exposées au cyberharcèlement ou le harcèlement en ligne, elles ont peur de naviguer en toute liberté. Lors d’une enquête initiée par Plan International en 2020, les résultats ont montré que les filles sont victimes de violence en ligne. Dans les données, « une fille sur cinq a quitté ou réduit considérablement son utilisation d’une plateforme de réseaux sociaux après avoir été harcelée, tandis qu’une fille sur dix a changé sa façon de s’exprimer ».
Le constat a été précis. 58% des filles de 15 à 25 ans ont déjà été victimes de harcèlement ou d’abus sur les réseaux sociaux. Ayant de graves conséquences sur la jeune fille, ces abus sont à l’origine du stress mental et émotionnelle chez elles.
En 1995, la Conférence mondiale de Pékin (Beijing), organisée par l’ONU sur la situation des femmes, a marqué une rupture dans la manière de prendre en compte les intérêts des femmes et leur participation aux processus de développement humain. On considère qu’il faut à présent utiliser l’approche « genre et développement », pour prendre en compte les femmes et les hommes dans leur contexte social. Deux objectifs dans cette approche : répondre aux besoins exprimés par les femmes et renforcer leurs capacités et leur autonomie afin d’agir sur les inégalités.
En somme, briser les normes, c’est permettre à la fille d’avoir accès aux espaces numériques en tant qu’actrice du changement, de développement et dans la participation dans la noble mission de bâtir la nation.
Augustin ANONWODJI
Crédit photo : haiti.unfpa.org
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