Né en avril 2012, sur fond de frustration et de réclamation, le “Mouvement du 23 mars” a depuis oscillé entre plusieurs dénominations. A la base, le mouvement qui découle de l’ex CNDP (Congrès National pour la Défense du Peuple), s’est peu à peu transformé et a évolué au fil des années pour devenir une “quasi-entreprise militaire privée”.
En effet, le groupe à majorité tutsi (ethnie d’origine du président Paul Kagamé du Rwanda), a été accusé dans plusieurs rapports de sécurité, de piller et de fournir des minerais à certains groupes internationaux. En exemple, selon un rapport des Nations-Unies, l’exploitation des ressources minières provenant de la cité minière de Rubaya (une zone du Nord-Kivu, contrôlée par le M23), a généré quelque 300 000 dollars (environ 200 millions FCFA) par mois.
M23, entre idéologie et clientélisme
Il est clair qu’à la base, l’objectif du M23 est de protéger la minorité tutsi dans l’est de la RDC. En effet, cette zone du pays est vue par Kigali comme étant majoritairement occupée par des Hutus, descendants et d’ex-responsables du génocide de 1994 au Rwanda, d’après certains analystes. Cette situation se présente ainsi comme le prolongement de la crise qu’a connu le pays des milles collines en 1994, avec le génocide des tutsis.
L’idéologie du M23 étant d’une part la sécurisation des “rwandophones” de la région , et d’autre part, l’anéantissement anticipé d’une quelconque idée de contre-génocide, idée qui pourrait naitre au sein des communautés hutsus du Nord-Kivu.
Cet état des choses explique en majeur partie, le soutien à peine masqué du Rwanda au M23, qui permet ainsi au pouvoir de Kigali de maintenir une zone d’influence; cette analyse contredit ainsi la version officielle du M23, qui continue de combattre parce que le gouvernement central à Kinshasa n’a pas respecté les accords du 23 mars 2009.
Ce traité prévoit notamment la libération des prisonniers, la transformation du CNDP en parti politique, et l’insertion de ses combattants tutsis dans les forces armées congolaises.
A cette accusation, oppose le gouvernement congolais, la thèse de l’exploitation et du pillage des ressources du pays par le M23. A l’est de la République démocratique du Congo (RDC), dans la cité minière de Rubaya, gite, plus de 15 % des réserves de tantale mondial, un métal rare utilisé pour produire des smartphones.
Or, selon une enquête de la Monusco de juin 2024, le M23 exploite ces mines, tout en contrôlant les routes commerciales de ces minerais en direction notamment du Rwanda.
Une situation qui explique le mutisme de la communauté internationale, relevé par plusieurs observateurs. Le Rwanda étant vu comme un sous-traitant des matières premières des ressources naturelles du Congo par les multinationales.
Notons qu’il y a plus de 20 ans, en 2001, avant même la création du M23, le Rapport Kassem(2001), a démontré que ce qui passait dans l’est de la RDC, était du fait de l’exploitation illégale des ressources naturelles par des réseaux d’élites transnationaux.
En rappel, il existe à ce jour, plus de 120 mouvements armés connus dans l’est du Congo.
Michel Glory Samuel TAKPAH, Journaliste et économiste togolais