La déroute (4-0) de la Côte d’Ivoire, pays organisateur de la CAN 2023, a glacé le pays. Au lendemain de l’humiliation, dans les rues d’Abidjan, une odeur fade se sent en plein nez dans les comportements et dans les discussions. L’Édito prend la température et tâte le pouls des Ivoiriens, ce mardi.

Ce 23 janvier 2023 s’apparente à une journée funèbre à Abidjan. Si les activités quotidiennes se déroulent normalement, la déception se lit facilement sur les regards, même si certains s’efforcent de la cacher pour se concentrer sur le gagne-pain.

De Port-Bouët, en passant par Koumassi et Treichville, les maillots oranges et blancs de la Côte d’Ivoire ont disparus de la circulation. Difficilement, on aperçoit une personne sur trente dans la tunique ivoirienne.

Entre déception et indifférence

Pour la circonstance, L’Édito a pris le Gbaka (voiture de plus de 15 places) du 43e Bima à la gare de Bassam, afin d’observer l’ambiance dans ce transport en commun. Réputé d’être un lieu de discussion entre les passagers, ce fut plutôt un silence dans ce Gbaka, chacun tête baissée et pousses pliées sur son smartphone. Certains ne peuvent se passer des jurons, des insultes, et des murmures devant des publications sur les Eléphants.

Des passagers muets dans le Gbaka

Le sentiment de déception saute aux yeux et les populations l’ont exprimé. À côté de son Wôrô-Wôrô (taxi) jaune à l’affût des clients, Evra, la quarantaine, ne peut cacher sa peine « Ce qu’ils nous ont fait hier là, ce n’est pas bon. Ils ont versé la honte sur nous comme ça. Je me suis réveillé avec déception. Je suis déçu ! », nous a confié ce conducteur à Port-Bouët.

Dans la commune de Treichville, à 11 km de Port-Bouët, Diallo Mohamed, la trentaine, adossé à un mur, bras croisé, fixe le vide du regard. « Sincèrement, je suis découragé hein. On a regardé le match au Village CAN de Treichville. Quand on nous a mis 2-0, on est parti. Les gens ont commencé à libérer les lieux », nous avoue-t-il.

Contrairement à Evra et Mohamed, le jeune Ange Michael semble ne pas être affecté. « La défaite d’hier, ce n’est pas grand chose, parce qu’on est déjà habitué. Sincèrement, c’est le pays, on ne peut rien faire », exprime cet habitant de Port-Bouët. Même son de cloche chez Emmanuel à Treichville « Quand on ne travaille pas, les résultats ne suivent pas », dit-il.

Plan du futur pour le changement

Devant le fait accompli, les populations ont déjà le regard tourné vers l’avenir. « Il faut revoir le staff, parce que tu ne peux pas prendre des joueurs blessés pour aller à la CAN ; ça ne se fait pas. Et puis, l’entraîneur connaît quoi de la Côte d’Ivoire même ? Donc qu’ils changent tout quoi, voilà », estime Ange Michael. « Particulièrement, la fédération ivoirienne doit revoir tout le staff complètement », dit Emmanuel, 28 ans.

Stationnement à Port-Bouët Centre

Cependant, Mohamed est d’avis contraire. « Ce n’est pas la faute de l’entraîneur (ndlr, Jean-Louis Gasset). La faute c’est aux joueurs. Ils ne se donnent pas l’envie de jouer même. A l’avenir, il faut appeler les jeunes car ils ont envie de jouer, ils veulent prouver sur le terrain ».

La défaite de la Côte d’Ivoire lors de cette de dernière journée du groupe A est resté au travers de la gorge de la population. Certains se retrouvant impuissants face à la situation.

Edem Attipoe (Abidjan, Côte d’Ivoire)